Prendre la parole pour la donner
À ceux qui le peuvent, à ceux qui le doivent, à ceux qui l’espèrent
Se rappeler combien elle coûte cher
Et tout ce qu’elle sème dans les jachères

Rêver d’ouverture et de tolérance
Qu’il y ait de la place pour tous, et du gros bon sens
Dénoncer le mépris des grands, qui est toujours petit
Et l’exclusion des petits, qui est toujours grande

Porter la plume à la hauteur du coeur
En passant par les failles de la tête, là où passe la lumière
Ouvrir les consciences à grands coups de vérités capées
Dans les dents de la bien-pensance
Troubler la paix en faisant crever le silence
Et ne jamais le regretter

Mordre dans la vie, plutôt que le contraire
Oser le pouvoir de se dire enfin
Malgré l’ampleur des abysses du destin
Se reconnaître le droit et le devoir d’être
Comme ça, comme soi

Guérir, un mot à la fois
Un monde qui a besoin de l’être
Écouter le grondement de l’âme en cataracte
Qui gruge la pierre des certitudes
Le crépitement des chandelles qui vacillent au vent
Les ailes des papillons de nuit qui se consument

Savoir partager le fardeau
En écorchant les convenances
Se découvrir légion
Un peu en chacun, clignotant comme des lucioles
Que ceux qui pensent n’être jamais tombés s’apprêtent à le faire
Et à se relever
Il n’y a d’abri nulle part ailleurs que dans les mains tendues
Et encore trop de regards qui tuent

Revendiquer le territoire
La folie claquant au vent pour étendard

Hissée haut
Trembler le long des virgules
En serrant les poings
Goûter le sel et le sang sur toutes ces joues
Sur les miennes aussi, beaucoup
Célébrer les tempêtes car elles nous apprennent à naviguer

Être éclaboussés à jamais par les déferlantes
De l’ouverture jusqu’au fin fond
Porter la peur sans cesse renouvelée
Des départs hâtifs, des suspensions et des cavalcades
Et célébrer pour toujours
Le courage de ceux qui restent et qui résistent
Porter fièrement leurs paroles
Jusqu’à Mars, au moins
Aller-retour

Je suis honoré comme une catapulte à pépites
D’être un transmetteur de vos réalités
Témoin privilégié de l’intime et du sensible
Je constate l’ampleur de mon impuissance
Et celle, croissante comme une lune, de la détresse
Et de ses ressacs
Qui érodent les caps en salissant la mer

Le peu que je peux,
C’est de vous tendre la plume
Et espérer
Ouvrir les oreilles et les cœurs
Avec du vrai
Je ne promets rien d’autre
Que la satisfaction d’avoir dit ensemble
Et tout mon respect

Merci pour votre confiance et votre ouverture
Je n’ai fait que récolter
Je croque la pomme prise pour cible
Je traite les pépins avec soin
Et ici poussera un verger

- Bilbo Cyr

Extrait du livre L’art des fous

Ceci est de la littérature brute, non filtrée, extraite le plus souvent en première pression, à chaud. Pas toujours loin de la crise. Les textes sont authentiques, originaux et servis tels que reçus. Ils témoignent de la réalité intime des auteurs, qui ont entre 9 et 35 ans. Pour plusieurs, c’est une première expérience d’écriture qu’ils ont choisi de faire partager. Pour d’autres, c’est leurs failles intérieures et leurs doutes qu’ils exposent, alors même qu’ils les découvrent.

Le Carrefour Jeunesse Emploi Avignon Bonaventure a choisi de donner pleine liberté de parole aux jeunes, afin de leur permettre d’exprimer, dans leurs mots, ce qu’ils vivent, et comment ils vont. Ceci suppose quelques entorses aux convenances et à la linguistique. C’est un choix conscient.

Le résultat a le mérite d’être vrai. La santé mentale est un tabou social. Pourtant, tout le monde en a une. Chacun a droit à sa manière d’en parler. Prenez soin de la vôtre et de celle de vos proches.

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