Dossier Santé mentale 

L’auteur-slameur et porte-parole du Mouvement Santé mentale Québec, David Goudreault, effectue tous les mois, avec d’autres artistes, en direct sur Facebook, une lecture publique de textes rédigés par des jeunes de 12 à 25 ans dans le cadre du projet d’écriture Déconfine tes pensées. Un beau clin d’œil au confinement vécu en raison de la pandémie COVID-19.

« On désire faire entendre vos mots dans l’espace public à travers nos voix. On souhaite savoir ce que vous avez ressenti pendant cette crise, ce que vous ressentez en ce moment. Tout est bienvenu ; écrivez en vers, en prose, des nouvelles, en inversé, en sanscrit, en calligramme, en slang… on veut vous entendre ! », explique David Goudreault.

Le niveau de stress, d’anxiété et de désespoir a généralement augmenté avec le confinement. Plusieurs jeunes sont retournés aux études avec le plaisir de revoir leurs amis, mais ont dû s’adapter au quotidien chamboulé des écoles. Le Mouvement Santé mentale Québec souhaite donner la parole aux jeunes en vue de favoriser leur résilience et réduire à long terme les effets nocifs de la pandémie sur leur santé mentale.

Vous pourrez lire ici des textes et des extraits reçus depuis l’automne dernier.


Exprimer ma colère

 Chère COVID-19,

 Je suis habituée d’écrire des messages à mes amis ou à ma famille pour leur dire à quel point ils sont importants pour moi, surtout en ces temps incertains. En revanche, j’ai rarement composé un message pour exprimer ma haine.

 J’ai commencé à entendre de parler de toi pendant les vacances de Noël. Je me disais que tu étais vraiment très loin de nous et que tu ne m’atteindrais jamais. Alors, je me suis carrément foutue de toi.

 Février est arrivé et tout était encore normal. Ensuite, mars est venu, ainsi que la semaine de relâche, où plusieurs personnes sont parties en voyage, partout dans le monde. Tu le sais très bien, tu t’es attaqué à plusieurs d’entre elles.

 En revenant de la semaine de congé, jamais je n’aurais pu croire qu’autant de victimes seraient affaiblies ou mortes par ta faute. Le mercredi 11 mars 2020, ma mère m’avait prévenue de rapporter mes effets scolaires au cas où l’école fermerait pour deux semaines. Éternelle obstinée ou positive, vois-le comme tu veux, j’ai plus ou moins respecté son conseil. Je n’avais aucune idée que je ne pourrais plus voir personne pendant des semaines, confinée avec ma famille.

 Ta présence dans notre pays a eu l’effet d’une bombe. Tu as explosé dans nos vies, sans te soucier de nous. J’ai essayé tant bien que mal de me convaincre que tu partirais dans le temps de le dire… mais un mois après le début du confinement, j’ai commencé à perdre espoir.

 Il y a des gens qui disent que tu nous colleras après pendant près de deux ans. J’ai souvent pleuré sur mon sort. Tu m’as fait perdre cinq mois de ma vie. Tu m’as enlevé un des seuls réconforts que j’avais, le contact humain. Le simple fait de voir des gens et de pouvoir les serrer dans mes bras. Tu m’as empêchée de profiter du temps avec la seule aïeule qu’il me reste.

  Tu as mis à risque mes deux parents qui travaillent aux services essentiels. Tu m’as enlevé ma motivation de continuer d’avoir une routine. Tu m’as poussée à bout. L’annonce que l’école secondaire continuerait seulement à distance m’a aussi bien découragée.

 L’été est arrivé. J’avais tant espoir que même avec toi dans les parages, les douanes américaines soient ouvertes. Bien sûr, je me suis fait une fausse joie. Encore une raison qui m’a poussée à te haïr.

 Mes amis et moi faisons souvent des partys l’été. Au moins, nous avons pu, à la mi-juillet. Tu as légèrement remonté dans mon estime. L’annonce que nous irions à l’école m’a rendue tellement heureuse, que j’ai essayé de te pardonner.

 Ce qui fonctionna. Jusqu’en octobre. Tu as refait surface dans ma vie, et ce, en grand. Tu as contaminé mon oncle, ma tante, mon cousin, ma seule grand-mère. Ma mère et mon père. Tu m’empêches encore de voir des gens, d’avoir une vie sociale ou tout simplement, encore une fois, d’avoir la motivation de continuer.

 Je sais que tout le monde dit qu’on ne sait pas apprécier les choses quand on les a, mais ce n’est pas vrai. Je profite de chaque instant, mais je ne vois pas ce qu’il y a de positif en ce moment.

 J’espère que tu auras compris que je n’ai jamais rien fait pour mériter ta haine et que tu n’aurais point la mienne si tu n’avais pas attaqué ma famille.

 Je te souhaite le pire. J’ai très hâte que tu quittes mon entourage. Ou fais juste disparaître et ne refais jamais surface. J’en connais plus d’un qui serait heureux.

 Ton ennemie éternelle,
 Vivichou, 14 ans, Boucherville. 

Gagner au change

 Lors de l’arrêt soudain de l’école, j’étais pris dans les griffes du vapotage et dans une relation toxique. Ces deux problèmes faisaient en sorte qu’à la maison, ma frustration se transformait en colère.

 Puisque j’étais bien habitué à ne jamais laisser paraître mes sentiments, mes parents ne comprenaient pas pourquoi je devenais agressif. Ils m’enlevaient toujours plus de privilèges. Ça rajoutait de l’huile sur le feu.
 Soudainement, j’ai été coupé de mon ravitaillement de nicotine, ce qui a été le pire moment du confinement pour moi, ainsi que probablement pour ma mère et mon père. J’étais en sevrage forcé. Puisque mes parents allaient m’assassiner si je leur faisais part de ma dépendance, je n’avais aucune porte de sortie.

 Ma solution : voir ma blonde toxique qui, elle, avait du ravitaillement. Pendant un mois, j’ai alors enduré son chantage émotif, des menaces de suicide, des dépenses excessives pour elle. Je l’ai même ramassée dans des partys, car elle était trop finie pour marcher. 

 Bref, je devais endurer tout cela pour un peu de nicotine.  Je ne suis pas fier de moi, pas fier du tout.  Cependant, sur ce que je croyais être un coup de tête, j’ai mis fin à notre relation. Le vide qui était omniprésent dans mon cœur s’est rempli tout seul. J’ai aussi décidé d’arrêter de vapoter. C’est venu tout seul, laissant ces mauvaises habitudes peu à peu.

 Les deux derniers mois ont surtout été du travail sur moi-même et, encore plus important, j’ai connu le pardon. Mes parents ont été compréhensifs et mon père, un peu vieux jeu, m'a fait bûcher tout l’été, ce qui m’a permis d’identifier ce que je veux faire de ma vie : la foresterie. Le confinement a été dur pour moi et mon entourage, mais j’en suis ressorti gagnant, avec finalement un objectif dans ma vie.
 
Louis Caleb, 16 ans, Acton Vale. 

Survivre est soutenu par le Fonds d’urgence pour l’appui communautaire, du gouvernement du Canada et par la Fondation du Grand Montréal. 

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Ressources sur le suicide

  • Québec: 1-866-APPELLE (277-3553). Les CLSC peuvent aussi vous aider.
  • Canada: Service de prévention du suicide du Canada 833-456-4566
  • France Infosuicide 01 45 39 40 00 SOS Suicide: 0 825 120 364 SOS Amitié: 0 820 066 056
  • BelgiqueCentre de prévention du suicide 0800 32 123.
  • Suisse: Stop Suicide
  • Portugal: (+351) 225 50 60 70

Guide d’intervention de crise auprès de personnes suicidaires

Le guide d’intervention auprès de personnes suicidaires démystifie le suicide. Il permet d’aider les proches à reconnaître les signes avant-coureur du suicide et de déterminer qu’est-ce qui peut être fait pour soutenir la personne en crise.

Une section du guide est réservée aux endeuillés par suicide.

Le livre est disponible au coût de 9,95$. Par téléphone: (514) 256-9000, en région: 1-877-256-9009. Par Internet.

Par la poste: Reflet de Société 4260 Ste-Catherine Est Montréal, Qc. H1V 1X6.

Maintenant disponible en anglais: Quebec Suicide Prevention Handbook.

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